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Prix des Azurés
17 mai 2016

Une maison qui vous ravira le coeur

Les bandes blanches défilaient sur les bords de la route. La chaleur écrasante de ce milieu d'après-midi faisait onduler l'air sur le capot gris et délavé de la Panda d'Henry, un sexagénaire fraîchement retraité, qui avait profité de sa prime pour s'acheter une nouvelle résidence. Il avait, toute sa vie durant, vécu en centre-ville, et voulait, pour sa retraite, finir ses jours dans un endroit paisible, dans la périphérie de l'agglomération.

L'agent immobilier lui avait décrit une maison en campagne, qui, selon ses dires, lui ravirait le cœur et qui lui permettrait de vivre paisiblement et de profiter de sa modeste retraite. Henry, ancien infirmier, avait sauté sur l'occasion. De plus, il n'avait eu à débourser que quelques dizaines de milliers d'euros pour se rendre propriétaire de l'endroit. Il avait vu quelques photos et avait pensé à ses petits enfants qui pourraient profiter du terrain lorsqu'ils lui rendraient visite. La maison, assez isolée, était légèrement délabrée mais le gendre d'Henry accepterait sûrement de l'aider à retaper un peu la vieille bâtisse.

En suivant les indications données par l'agent immobilier, le jeune retraité, après une trentaine de minutes de route, trouva le petit tunnel qui conduisait au bien à visiter. Il déboucha dans un terrain où les arbres étaient rares et calcinés par la canicule de cette année particulièrement chaude. Il vit la maison. Elle disposait de deux étages et d'un grenier, ainsi que d'une cave assez impressionnante, qui couvrait la majeure partie de la surface de la maison. Sa voiture s'arrêta lentement en toussotant. Elle finit par caler à une cinquantaine de mètres de la maison. Henry regarda le compteur. Le réservoir de carburant était vide. Le vieil homme vérifia sa montre : il était bientôt cinq heures de l'après-midi. Il savait son frère disponible si le garage n'était plus ouvert. Aussi décida-t-il de visiter une seconde fois la propriété. Il l'avait brièvement vue durant sa première venue avec l'agent, mais il n'avait pas eu l'occasion d'en voir toutes les parties tant le vendeur avait semblé pressé de partir du lieu.

Henry poussa la porte de bois qui grinça et s'ouvrit avec difficulté. Le hall était seulement éclairé par la lumière du jour. Il était possible de distinguer avec difficulté un chandelier ancien, suspendu par une chaîne corrodée, ainsi que quelques vieux meubles, oubliés par des propriétaires peu minutieux. Le retraité alluma une lampe de poche qu'il avait pris la précaution de prendre avant de sortir de sa voiture et il scruta pendant quelques minutes la pièce. Il remarqua ensuite une petite porte délabrée dans un angle de la pièce. Il ne l'avait pas remarquée auparavant, aussi décida-t-il de voir à quoi elle menait. Il s'approcha et saisit la poignée de fer rouillée. Il eut le plus grand mal à ouvrir la porte mais après quelques efforts, cette dernière céda et laissa apparaître un escalier. Henry avait déjà visité la cave, mais ne se souvenait pas de ce chemin. Il s'engagea dans le mince corridor, sa lampe-torche à la main. Les marches de bois étaient grinçantes et vermoulues. L'une d'entre elles était même fendue. L'homme descendit avec prudence. L'escalier menait à une pièce de taille moyenne, remplie de toiles d'araignée et de poussière. D'anciennes caisses étaient couvertes par de vieux draps jaunis par le temps.

Henry avança dans cette partie encore inconnue de la maison. A mesure qu'il avançait, en scrutant l'obscurité, l'atmosphère lui paraissait de plus en plus oppressante. La tête lui tournait, comme si un poids invisible pesait sur la pièce entière. Il se força tout de même à aller jusqu'au bout de la salle obscure. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il remarqua qu'en lieu et place d'un mur de pierre identique aux trois autres, se trouvait une immense toile blanchâtre, accrochée aux murs ! Alors qu'il observait minutieusement la pièce de tissu, il lui sembla voir une ombre sur le côté gauche de la toile. Il se tourna. Rien. Après une attente qui lui parut interminable, il décida de voir ce qui se trouvait derrière le drap.

Lorsqu'il retira le tissu, il dégagea une grande quantité de poussière. Sa lampe s'éteignit brusquement: les piles devaient être usées. Il n'avait pas eu le temps de voir ce qui se trouvait au delà du voile. Alors qu'il se retournait, prêt à repartir pour aller appeler son frère, il vit nettement, une ombre. Un bras se trouvait sur le mur, terminé par une main arachnéenne. Henry ne la vit qu'une fraction de seconde. Elle disparut. La surprise était forte. Sa peur l'était encore plus. Il sentit une douleur dans la poitrine. Sa vision se troublait. Son corps entier se contracta sous l'effet de la douleur. Il était pris de contraction. Il s'écroula. Pendant quelques secondes, il lui sembla distinguer un visage, avant de percevoir, au travers de la face brumeuse, une poutre noueuse. Ses yeux se fermèrent. Il cessa de bouger. C'était terminé.

L'agent avait raison, cette maison lui avait ravi le cœur.

 

Fin

 

Baptiste Rostalski et Gaël Piquet

2de11, Lycée Koeberlé

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